Menaces de mort contre Mila : cinq personnes en garde à vue

9 février 2021 à 11h13 par Iris Mazzacurati

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Une enquête avait été ouverte mi-novembre après les réactions suscitées par une nouvelle publication
Crédit : Pixabay - photo d'illustration

Cinq personnes ont été placées en garde à vue mardi 9 février dans l'enquête sur les menaces de mort proférées à l'encontre de l'adolescente iséroise Mila, après la publication en novembre par cette dernière d'une nouvelle vidéo polémique sur l'islam, a annoncé le parquet de Paris.

Ces cinq personnes, âgées de 18 à 29 ans, ont été interpellées en Loire-Atlantique, en Moselle, dans le Calvados, la Marne et les Hauts-de-Seine.

Elles ont placées en garde à vue pour "cyberharcèlement" et "menaces de mort" dans le cadre des investigations menées par le pôle national de lutte contre la haine en ligne, récemment créé au sein du parquet de Paris.

L'enquête a été ouverte initialement mi-novembre par le parquet de Vienne (Isère) après les réactions suscitées par la nouvelle publication sur le réseau social TikTok de la jeune fille, qui fêtera bientôt ses 18 ans.

Mais ce parquet s'était dessaisi début décembre au profit du tout nouveau pôle national de lutte contre la haine en ligne, destiné à centraliser les investigations à mener dans différentes régions de France.

Ce sont les services de police et de gendarmerie locaux qui ont procédé aux interpellations, sous la coordination opérationnelle de la division de lutte contre les crimes de haine de l'Office central de lutte contre les crimes contre l'humanité, les génocides, les crimes de guerre et les crimes de haine (OCLCH).

"Depuis Twitter, et pour certains, menacer de mort est devenu chose commune", a réagi l'avocat de Mila, Richard Malka. "Il est grand temps que chaque personne qui menace de mort sache qu'il peut finir en garde à vue puis devant un tribunal correctionnel et avec un casier judiciaire", a poursuivi Me Malka. "La peur doit changer de camp et doit être éprouvée par ces lâches qui harcèlent et menacent sous anonymat."

"L'Etat agit pour protéger #Mila", s'est pour sa part félicité sur Twitter le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.

Droit au blasphème

Les auteurs de menaces de mort encourent jusqu'à trois ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende.

La vie de la jeune fille a basculé en janvier 2020, quand elle a publié une vidéo devenue virale dans laquelle elle proférait de virulentes critiques sur l'islam. "Le Coran il n'y a que de la haine là-dedans, l'islam c'est de la merde", disait-elle dans cette vidéo, initialement diffusée dans une discussion personnelle.

Ses propos ont déclenché un déferlement de menaces, la contraignant à quitter son lycée de Villefontaine (Isère). Mais elle a aussi reçu beaucoup de soutiens, notamment sur la toile via le hashtag #JesuisMila. Des politiques et des personnalités ont pris parti pour Mila, au nom de la liberté d'expression et du droit de critiquer une religion même de manière outrageante.

"La loi est claire: nous avons droit au blasphème, à critiquer, à caricaturer les religions", était lui-même intervenu Emmanuel Macron. "L'ordre républicain n'est pas l'ordre moral. Ce qui est interdit, c'est l'appel à la haine, l'atteinte à la dignité".

En novembre, dans une nouvelle vidéo publiée sur TikTok, la jeune fille s'en est pris vertement à ses détracteurs: "Et dernière chose, surveillez votre pote Allah, s'il vous plaît. Parce que mes doigts dans son trou du cul, j'les ai toujours pas sortis".

Une nouvelle salve de menaces a suivi. Sur Twitter, l'adolescente a partagé des captures d'écran des menaces de mort reçues, certaines évoquant l'assassinat du professeur Samuel Paty.

En décembre, la jeune fille a été écartée de l'internat du lycée militaire qu'elle avait intégré dans le plus grand secret, après avoir donné le nom de l'établissement lors d'une discussion sur un réseau social avec une vingtaine de personnes.

Deux personnes ont déjà été condamnées l'an dernier à des peines de prison pour des menaces de mort envers Mila. D'autres sont mises en examen dans l'enquête sur les menaces de mort de janvier 2020 et la diffusion de ses coordonnées.

Cette vague d'interpellations intervient alors que les députés examinent le projet de loi sur le "séparatisme", qui doit renforcer l'arsenal contre l'islam radical notamment en réprimant plus sévèrement la haine en ligne.



(Avec AFP)